ENFANCE “SANS BRAS” = ADULTES INSÉCURES
Comment traverse-t-on l’enfance ? Que fait-on de ce qu’on a fait de nous ?
L’enfant qui arrive dans une famille, ouvert à l’autre et curieux de la vie, se heurte à la réalité humaine. Des parents absorbés par le travail. Pas assez de mots tendres, pas assez de gestes sécures. Des tensions et des non-dits. Des systèmes familiaux dans lesquels la relation est souvent fonctionnelle, efficace, dénuée de la parole qui permet de mettre du sens sur ce que l’on vit.
Il est des histoires plus sombres que d’autres. Des histoires forgées précocement par l’abandon, la violence, le rejet, l’abus, la manipulation, le deuil.
Oh il n’est pas question ici de faire le procès des parents, qui font généralement de leur mieux, ne pouvant redonner que ce qu’ils ont eux-mêmes reçu. Mais il s’agit de voir combien l’écrasement des sensibilités et de la singularité par les systèmes familiaux, scolaires, institutionnels conditionne et hypothèque nos capacités de vivre ensemble.
Le regard que l’on porte sur l’autre l’emprisonne ou le libère, l’écrase ou lui donne des ailes. Quand le lien n’est pas mature, l’autre, l’enfant, est vu comme un objet et non comme un sujet à part entière. On fait ce qu’on veut avec un objet. On le bouge de place, il doit être utile et servir à quelque chose, il doit faire la fierté de son propriétaire.
Le Morvan est une de ces terres pauvres qui s’est vue prendre ses ressources pendant des décennies : son bois chauffait Paris, ses nourrices allaitaient les enfants parisiens, les enfants de l’assistance faisaient tourner les fermes morvandelles. Un territoire marqué par les séparations et la précarité. Une histoire dans laquelle les pauvretés s’entrechoquent, celles des mères célibataires, celles des paysans.
Et ça laisse des séquelles car le mode relationnel a été appris “à la dure”. Dans les lignées, la survie passe par la débrouillardise. L’autre est mis à distance, la parole peut être abrupte et la critique féroce, par défense, par protection, par fierté d’être autonome et “fort”. La confiance en soi, en l’autre, en la vie, fait parfois défaut.
Ici on sait qu’on est de passage. Alors pourquoi s’attacher ?
Mais l’histoire des familles du Morvan se retrouve dans toutes les familles, dans toutes les histoires.
Qui n’a jamais été confronté, dans l’enfance, à l’autorité froide d’un adulte ?
Qui n’a jamais attendu vainement des bras véritablement ouverts et tendres ? Qui n’a jamais souffert d’un regard dénigrant, d’un silence assourdissant ? De la comparaison avec un frère, une cousine, un copain, un collègue ?
Les déceptions, les tristesses, les colères, les peurs de l’enfance “s’avalent” par nécessité. Et notre édifice d’adulte se construit sur des fondations instables. Toujours plus de ciment pour colmater les brèches. Mais les conditionnements, les mal-à-dits, le mal-être psychique, les addictions parlent pour l’enfant que nous sommes encore. Notre enfant intérieur attend en silence qu’on le replace dans sa vérité.
Travailler sur son histoire permet d’en voir les vides, les manques, et les débordements. L’enjeu n’est rien moins que d’en sortir, de se mettre en paix et de se redresser. Libre.
Frédérique
JEAN-JACQUES : UNE VIE SOUS HAUTE TENSION
“Je suis né en septembre 1951, avenue Denfert Rochereau à Paris, comme tous les enfants de l’assistance publique.
Je fais partie de ceux qui ont eu de la chance…”
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Les chemins zintérieurs_Juillet 2025_Jean-Jacques BRUCKER et agenda-VF-format compressé